Non, il ne s’agit pas du passage du Tour de France, lequel je crois bien, ne s’est pas encore aventuré dans ces paysages sauvages de la vallée de l’Agly où chaque montagne annonce l’amorce d’une mystérieuse vallée. Bastion ultime avant l’Aragon, au moyen âge la tour du château aujourd’hui ruiné permettait de surveiller la frontière. Entre Corbières et Fenouillèdes, c’est dans ce village éminemment vigneron posé sur un méandre de l’Agly que s’est installé Jean-Louis Tribouley. Il suffit de survoler les alentours par satellite interposé pour s’apercevoir que les vignes sont encore, malgré les arrachages, présentes presque partout autour du village. Elles l’étaient encore plus si l’on en juge par les traces de sentiers et de délimitations qui criblent la colline au nord du village, entre l’Agly et la D.79. Je vous invite à aller voir cela sur le site Histoire du Roussillon un lieu fort bien documenté. Moi, ça me fascine...
Dans ce décor de western médiéval, sec au possible, prenez une vigne orientée plein sud sur une terre de gneiss plantée de vieux pieds de Carignan. Une chose est sûre : vos rendements n’auront rien à voir avec ceux du Médoc. Venu du Nord avec ses 40 ans, beaucoup de volonté et un peu de sous, Jean-Louis Tribouley, installé depuis 2002 après une bac pro à Beaune et une année chez Gérard Gauby, s’est vite fait connaître à mes papilles pour sa cuvée « Les Copines ». Il s’agit d’un Côtes-du-Roussillon du genre jouissif où le carignan est déjà présent à 80 %, associé au grenache. Au passage, signalons que ce vigneron fait partie de mon Top 50 des meilleurs vins bio du Languedoc et du Roussillon qu'un jour je publierai sur mon tout nouveau blog PourleVin.
Mais depuis le millésime 2007, le gars produit dans la discrétion une cuvée découverte, il y a peu, au hasard de la lecture d’une carte de restaurant, Le Garianne, à Perpignan, lieu déjà vanté dans ce blog. Comme quoi, on a beau habiter le département des PO et faire croire que l’on sait tout… Bref, « Elepolypossum » est le nom de la cuvée et seul Jean-Louis est capable de vous expliquer sa signification. Il s’imprime sur une étiquette colorée plutôt dans les bleus signant cette cuvée vinifiée le plus simplement du monde (levures indigènes, cuvaison courte) et ne dépassant guère les 2000 exemplaires.
Bu frais, ce qui s’impose encore plus avec l’été qui frappe à la porte, le vin vous saute au gosier. Toujours cette merveilleuse acidité du cépage qui se met en avant pour vous réjouir le palais. Mais cela se passe avec finesse, dans un joli cadre de petits fruits sauvages, non sans justesse, pureté et tendresse au point que l’on en oublierait même que ce vin affiche 14°. Inutile de dire que l’on écluse la bouteille en moins de deux, sur une belle côte de porc, par exemple, mais mieux encore, sur une darne de bonite grillée tel un pavé de bœuf. La bouteille de ce Vin de Pays des Côtes Catalanes (un de plus !) 2008 est vendue 13 € départ cave.
Michel Smith